Enquête 'Conditions de vie et aspirations des Français' Les Français, la Nature et l'environnement

A. Dufour

Collection des rapports N°R151

Résumé

Les questions se rapportant à l'environnement ont, depuis longtemps, été suivies dans le système d'enquêtes "Conditions de vie et Aspirations des Français". Si la double dimension, cadre de vie et environnement, a toujours été présente dans les interrogations des différents souscripteurs au fil du temps, les questions se sont orientées, dans les années récentes, autour d'une conception large de l’environnement. Cette année, les interrogations posées par l'Institut Français de l'Environnement (IFEN) sont assez diversifiées. De nouvelles questions se rapportent, par exemple, à la nature. Une autre très concrète a trait aux garanties de qualité attendues par la population lors de l'achat de produits alimentaires. Enfin, certaines questions déjà posées dans les années passées sont relatives aux actions de l'Etat et à celles, plus individuelles, des Français en matière de lutte contre la dégradation de l'environnement.

En préalable à l'exploitation proprement dite des questions insérées par l'IFEN cette année, peut-être est-il intéressant de rappeler certains éléments pouvant servir de données de cadrage à cette étude. En effet, l'historique de l'enquête "Aspirations" recèle toute une série d'informations qui permettent de mieux cerner la façon dont les Français appréhendent globalement l'environnement/la nature/le cadre de vie.

Nature, cadre de vie, environnement, ces trois termes sont parfois confondus ou assimilés. Ils font, en réalité, appel à trois notions différentes. Le cadre de vie a généralement une définition plus restrictive que l'environnement. Les problèmes de cadre de vie proprement dit sont plutôt liés aux caractéristiques de l’habitat, tandis que la sensibilité à l'environnement dépend davantage des caractéristiques socioéconomiques ou socio-culturelles des individus. En fait, la perception du cadre de vie est plutôt rattachée à des préoccupations assez personnelles, alors que les attitudes sur l'environnement recoupent des préoccupations beaucoup plus collectives.

Une question sur le cadre de vie est suivie depuis le début du système d'enquêtes "Aspirations" (1978). Elle est formulée comme suit : "Que pensez-vous de votre cadre de vie quotidien, c'est-à-dire ce qui entoure le logement où vous vivez ?". A cette question, les Français expriment très largement leur satisfaction. La proportion d'individus satisfaits est, en effet, en fin 1993, de 84%, et elle n'a pour ainsi dire pas bougé depuis quinze ans. On perçoit, certes, quelques variations des réponses suivant le degré d'urbanisation et le type de logement des personnes interviewées, mais le sentiment de satisfaction est toujours prédominant. On peut se risquer à émettre une hypothèse pour expliquer le niveau élevé de satisfaction des Français sur leur cadre de vie. Elle repose sur l'idée que les individus ont probablement tendance à effectuer inconsciemment un ajustement entre le cadre de vie qu'ils désirent et le cadre de vie qu'ils possèdent. Cela les conduit Finalement à s'estimer relativement satisfaits. Cette hypothèse est d'ailleurs assez en concordance avec les résultats que l'on obtient sur les jugements portés sur l'état de l'environnement dans sa région, en France, dans la CEE et dans le monde.

En effet, les opinions exprimées par les Français sur l'état de l'environnement, de l'échelle régionale à l'échelle mondiale, sont d’autant plus négatives que la zone géographique de référence est vaste et éloignée de l'enquêté. Quand on parle de ce qui est proche de soi (sa région, son cadre de vie quotidien), on est davantage satisfait que lorsqu'on fait référence à des problèmes planétaires. Ainsi, seulement 16% des Français estiment, en fin 1993, que l'état de l'environnement dans leur région est mauvais alors qu'ils sont 22% de cet avis pour l'état de l'environnement français, et 62% pour l'état de l'environnement dans le monde.

Dans l’absolu, la dégradation du système écologique est un sujet qui préoccupe les Français. Mais cette inquiétude est à relativiser en regard d'autres sujets d'intérêt général. Une question assez généraliste, figurant à plusieurs reprises dans le système d'enquêtes, aborde le problème de la dégradation de l'environnement, en le mêlant à toute une série d'autres domaines. Elle se présente sous la forme d'une liste de sujets au sein de laquelle il faut choisir les deux les plus préoccupants. "La dégradation de l'environnement" est citée au total (première et deuxième réponse confondues), en fin 1993, par 8% des Français (2% en première réponse et 6% en seconde réponse). Cela la situe en huitième place des préoccupations, loin derrière le chômage, la drogue, les maladies graves, la pauvreté ... Le cumul des deux réponses, qui était autour de 11- 12% entre 1990 et 1992, accuse cette année une baisse sensible (5 points de moins). Les préoccupations grandissantes concernant le chômage et la pauvreté en France ont largement contribué à cette chute concomitante des inquiétudes relatives à la dégradation de l'environnement.

Remarquons qu'on dispose aussi d'un autre indicateur qui permet, à sa manière, de refléter les préoccupations liées aux questions environnementales : il s'agit du taux d'adhésion à une association de défense de l'environnement. Celui-ci est très faible, d'après les déclarations relevées dans l'enquête : il oscille depuis dix à quinze ans autour de 3% (2,7% exactement en fin 1993). Cet indicateur n'est donc pas forcément révélateur des fluctuations des préoccupations à l'égard de l'environnement au fil du temps.

Finalement, si le cadre de vie semble plutôt satisfaire nos concitoyens, l'environnement est, pour eux, source d'inquiétude. Certes, cette crainte est à relativiser car un bon nombre d'autres sujets passent avant, mais on a pris conscience de certains dangers qui peuvent découler, par exemple, de la pollution de l'eau ou de l'air. Les questions d'environnement sont aujourd'hui régulièrement évoquées dans les médias. L'effet de serre, le trou de la couche d'ozone sont des phénomènes que l'on ne perçoit pas encore très directement, ni concrètement, mais qui commencent à inquiéter les populations. De même, la gestion des déchets industriels et ménagers est une question cruciale au jour d'aujourd'hui. C'est pourquoi les produits conçus avec une préoccupation du respect de l'environnement (avant, pendant et après leur consommation) connaissent d'ailleurs un réel engouement auprès des consommateurs. Il semble donc primordial, dans ce contexte, de s'interroger sur la perception qu'ont les Français de ces différents problèmes et de savoir ce qu'ils sont concrètement disposés à faire.

Le présent rapport s'organise en quatre sections, très distinctes les unes des autres :

* La première section est relative aux interrogations sur la nature. A quoi fait-on référence lorsqu'on évoque la nature ? Quels sont les éléments qui, selon les Français, en font partie ? Et quelles sont les associations les plus fréquentes entre les divers éléments cités ? Comment juge-t-on l'état de la nature ? Est-elle plus ou moins dégradée qu'elle ne l'était il y a dix ans ? Enfin, a-t-on conscience de ce qui pollue dans nos habitudes de tous les jours ?

* La deuxième section concerne le rôle de l'Etat en matière de protection de l'environnement. Comment les Français jugent-ils les actions des pouvoirs publics en la matière ? Quels sont les liens qui existent entre ce jugement et l'opinion que l'on a sur l'environnement ? Quelles sont les actions que l'Etat doit mener en priorité afin de mieux préserver et protéger l'environnement ?

Une question d'un ordre un peu différent traite, par ailleurs, de l'entretien des terres abandonnées par les propriétaires : est-ce à l'Etat, aux communes, aux propriétaires ou aux agriculteurs qu'il incombe la responsabilité de les entretenir ?

* La troisième section aborde la question de la contribution personnelle de chacun des Français dans la lutte contre la dégradation de l'environnement. Les préoccupations de nos concitoyens peuvent en effet se refléter dans les actions qu'ils se déclarent prêts à engager. On mesurera, en premier lieu, la proportion de ceux qui se disent prêts à apporter leurs déchets triés dans des lieux spécifiques (déchetteries) dans la perspective d'un recyclage. Mais l'engagement véritable de nos concitoyens dans ce domaine sera probablement mieux révélé par la part de ceux qui sont disposés à acquitter plus de taxes affectées directement à la défense de l'environnement.

* Enfin, une dernière section sera relative à l'achat de produits alimentaires et aux garanties de qualité auxquelles la population attache le plus d'importance.


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