Achats d'automobile : neuf ou d'occasion ?

J-L. Madre

Collection des rapports N°R11

Résumé

Notre objectif est d'analyser les variations des achats d'automobiles sur les marchés du neuf et de l'occasion depuis le déclenchement de la crise, c'est-à-dire sur la période 1973-85. Nous nous intéressons donc plus au rapport entre ces deux marchés qu'à l'évolution du volume global de la demande. Nous commencerons par présenter les données, la méthodologie et les résultats d'ensemble. Nous considérerons ensuite comment ils varient selon les différents types de voitures d’une part, et selon les catégories de ménages acheteurs d'autre part. La taille des échantillons n'a pas permis de croiser les caractéristiques des voitures avec celles des ménages.

1- METHODOLOGIE

La principale source utilisée est l'enquête I.N.S.E.E. de Conjoncture auprès des Ménages. Le rapprochement des flux d'achats qu'elle enregistre sur une certaine période {année civile par exemple) avec les statistiques d'immatriculation fait apparaitre que :

-le champ couvert n'est pas limité aux achats des ménages; en effet, environ le tiers des voitures neuves acquises par les entreprises sont mises à la disposition des ménages comme "voitures de fonction".

-les achats neufs enregistrés dans les enquêtes correspondent bien aux immatriculations de voitures neuves.

-par contre, les achats d'occasion ne représentent qu'à peine la moitié des immatriculations d’occasion; cette sous-estimation, particulièrement stable au cours de la période étudiée, indique vraisemblablement une différence de champ, qui n'a pas encore pu être complètement élucidée (changements d'immatriculation correspondant à un déménagement,...).

Au cours de la période étudiée, la proportion de voitures achetées neuves tend à diminuer, surtout depuis 1979. Autour de cette tendance, les crises (1974-75, 1980-81, 1984-85) et les reprises alternent.

L'évolution du partage du marché est la résultante de deux phénomènes :

-la comparaison entre l'état des voitures achetées pendant une certaine période avec celui des voitures qu'elles ont remplacées (origine automobile),

-l'évolution des durées de conservation des véhicules.

Le marché automobile français est de plus en plus un marché de renouvellement (pour plus de 80%). Or, une partie de la clientèle qui passait au neuf reste maintenant sur le marché de l'occasion. Chez les accédants (premier achat d’automobile ou passage à la seconde voiture) la part du neuf, déjà faible, diminue aussi.

La tendance générale est à l’allongement des durées de possession; mais celui-ci est beaucoup plus net pour le neuf que pour l'occasion. Avec un an de décalage, les crises correspondent à un accroissement de la durée de conservation des voitures neuves.

2- LES DIFFERENTS TYPES D'AUTOMOBILES

Tous les niveaux de gamme suivent le schéma d'évolution que nous venons de décrire sauf la "moyenne-inférieure". En liaison avec le développement d'une offre nouvelle, la part des achats neufs remonte à partir de 1981 pour ce niveau de gamme. Cette évolution est stimulée par un accroissement de la proportion de renouvellements liés à des changements de gamme : 40% des achats neufs de "moyennes-inférieures" au début des années 80 visent à remplacer des voitures neuves d'autres niveaux de gamme. On notera aussi que les "moyenne-inférieures" sont les seules dont la durée de conservation diminue.

Chez les ménages multi-équipés, le contraste est très accusé entre la première voiture achetée neuve et conservée longtemps, et la seconde souvent d'occasion et renouvelée fréquemment. La voiture unique des ménages mono-équipés a des caractéristiques intermédiaires entre ces extrêmes. Enfin, dans l'analyse des renouvellements (comparaison des caractéristiques de la voiture actuelle et de la précédente) nous avons remarqué une liaison très forte entre achat neuf et à crédit d'une part, et achat d'occasion et au comptant d'autre part.

3- QUI SONT LES MENAGES ACHETEURS ?

Parmi les variables décrivant la composition du ménage, c'est certainement l'âge qui a donné les résultats les plus intéressants : la part des achats neufs croît avec l'âge du chef de ménage. Si l'on observe une même génération en 1974-75 et en 1984-85, la proportion d'achats neufs ne varie pas sensiblement; elle augmente même un peu chez les ménages dont le chef est né avant 1925. Mais la proportion d'achats neufs tombe très bas (environ 25%) pour la nouvelle génération des ménages non encore formés en 1974-75 (chefs de ménages nés après 1955). Le simple remplacement des générations contribue donc à la dégradation du marché du neuf, mais le vieillissement de la population joue en sens inverse.

D'après la ventilation en fonction de la C.S.P. du chef de ménage, la préférence pour le neuf semble d'autant plus forte que les ressources du ménage sont élevées. On notera toutefois l'importance du neuf chez les "inactifs" (à rapprocher du comportement des ménages âgés décrit ci-dessus) et la large prépondérance de l'occasion chez les agriculteurs. L'évolution de la situation financière du ménage au cours des six derniers mois rend bien compte de l'alternance des crises et des reprises. Par contre, l'anticipation de cette situation financière pour "les mois qui viennent" détermine l’évolution du niveau d'équipement du ménage, mais pas son choix entre neuf et occasion pour un renouvellement; comme l'occasion domine chez les accédants, elle est paradoxalement prépondérante chez ceux qui prévoient une amélioration de leur situation financière.


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