Qualité de vie et nuisances sonores : opinion et comportements des Franciliens

P. Croutte - S. Lautié

Sourcing Crédoc N°Sou2017-4513

Résumé

La question environnementale occupe aujourd’hui une place importante dans le débat public.

Depuis le milieu des années 90, les Français affirment régulièrement leur sensibilité aux problèmes d’environnement. En matière d’opinions, il est rare d’observer un consensus si stable dans le temps. Dans le dernier Eurobaromètre consacré à l’environnement, 53% des Français jugent « très important » » la protection de l’environnement et 42% « plutôt importante » (95% au total).

Les sujets d’inquiétudes dans le domaine sont en revanche plus mouvants : les inquiétudes locales sur les « pluies acides » et le dépérissement des forêts dans les années 80 ont fait place à des enjeux internationaux comme le réchauffement climatique ou la biodiversité. Et le souci de protéger la planète de la main de l’homme s’est converti en recherche de développement durable.

D’une façon générale, les Français, comme l’ensemble des Européens, se préoccupent en priorité de la pollution de l’air, de la pollution de l’eau et de l’impact sur la santé des produits chimiques utilisés dans les produits de tous les jours. De précédentes investigations ont déjà établi que la pollution sonore n’est pas dans le top 5 des préoccupations environnementales. Mais, à l’échelle du quartier et dans le logement, c’est-à-dire dans ce qu’il y a de plus intime, ce sont les gênes liées au bruit qui sont le plus souvent évoquées par nos concitoyens. Et l’Ile-de-France, qui abrite 12 millions d’habitants, se distingue, sur ce sujet comme sur d’autres. La région capitale est exposée à un fort niveau de nuisances sonores : une enquête de 2007 sur la perception du bruit en Ile-de-France avait établi qu’un Francilien a deux fois plus de chances qu’un autre d’être gêné par le bruit à son domicile. En cause, un habitat concentré, une exceptionnelle densité des infrastructures de transports (réseau routier, carrefour ferroviaire, système aéroportuaire) mais aussi la présence de nombreuses activités industrielles, touristiques et commerciales. Une cartographie des expositions au bruit des transports a déjà été réalisée et l’on a même tenté de quantifier l’impact sanitaire du bruit dans l’agglomération parisienne (en années de vie en bonne santé perdues) ainsi que son coût social . En effet, les conséquences du bruit sur la santé ne sont aujourd’hui plus à démontrer : ils regroupent les effets sur l’audition (fatigue auditive, perte d’audition temporaire ou définitive, acouphènes, hyperacousie) qui sont généralement le fait d’expositions, en milieu professionnel ou lors des loisirs, à des niveaux sonores élevés (supérieurs à 80 dB(A)) ou répétés, ainsi que de nombreux effets extra-auditifs néfastes pour la santé (perturbation du sommeil, stress, maladies cardio-vasculaires ...) qui peuvent se manifester pour des expositions à des niveaux de bruit beaucoup plus faibles comme c’est généralement le cas avec le bruit dans l’environnement.

L’association Bruitparif, Observatoire du bruit en Ile-de-France, a pour objectif de développer les connaissances dans le domaine de l’environnement sonore et de mener des évaluations. Afin d’éclairer les politiques publiques, de hiérarchiser les enjeux et d’orienter son programme d’actions, Bruitparif a confié au CREDOC la réalisation d’une enquête auprès des Franciliens pour caractériser la perception qu’ils ont des nuisances.

L’enquête a de multiples objectifs. Elle permet de déterminer quelle est la place du bruit parmi les différents problèmes qui affectent la qualité de vie des Franciliens et de répondre à d’autres questions : quelle est, pour les habitants de la région, la perception de l’environnement sonore dans les différents contextes d’exposition possibles, que ce soit dans son logement, dans les transports, au travail ou pendant les loisirs ? Dans chacun de ces registres, quel type de nuisances sonores est jugé la moins acceptable ? Qu’est-ce qui est le moins bien toléré : les pics de bruit ou le bruit de fond permanent ? Quel est l’impact des nuisances sonores sur les comportements des Franciliens ? Sont-ils informés des possibles conséquences sanitaires de l’exposition au bruit ? Sont-ils nombreux à adopter des comportements à risque, par exemple en pratiquant des loisirs bruyants ou en ne prenant pas les précautions nécessaires ? Les Franciliens connaissent-ils les actions à mener contre le bruit, savent-ils identifier les acteurs et les dispositifs qui existent en la matière ? Quels sont leurs besoins et leurs attentes ?

Le travail effectué ici est donc complémentaire de la caractérisation physique du bruit : il ne s’agit pas de la mesure effective, scientifique du bruit en décibels mais de déterminer le ressenti, la sensibilité des habitants dans toutes les situations pendant lesquelles ils sont confrontés, volontairement ou pas, à du bruit.

L’enquête a été réalisée auprès de 3 046 personnes âgées de 15 ans et plus, résidant en Ile-de-France, qui faisaient partie d’un panel d’internautes. Elles ont été interrogées, en ligne, lors de deux vagues distinctes : au printemps 2016 (1 500 personnes) et en hiver 2016 (1 546 personnes). Chacun des deux échantillons a été bâti en fonction des quotas suivants : département de résidence, sexe, âge (en 5 tranches), catégorie socio-professionnelle, type d’habitat (individuel ou collectif). Un redressement a été effectué pour que chaque échantillon interrogé corresponde parfaitement à l’échantillon théorique. Les deux fichiers de données ont, ensuite, été fusionnés pour constituer une base unique de résultats exploitables.

Les analyses ont, notamment, distingué les réponses en fonction du lieu de résidence des personnes interrogées : les Parisiens (ceux qui résident intramuros), les habitants de la métropole Grand Paris (dans son ensemble et hors Capitale), de l’agglomération parisienne, ou des zones les moins densément peuplées (Ile-de-France hors agglomération parisienne). L’analyse a également établi l’influence des caractéristiques sociodémographiques plus classiques (âge, sexe, niveau de vie ou de diplôme, etc.), des caractéristiques de l’habitat et mesuré un possible effet de saisonnalité (c’est pourquoi le recueil de l’information s’est organisé en deux périodes distinctes).

L’objectif était donc de dresser un état des lieux précis et détaillé de la perception par les habitants d’Ile-de-France des nuisances sonores auxquels ils sont exposés. Quand cela s’est avéré possible, les résultats de l’enquête menée en 2007 ont été rappelés. Les éventuelles comparaisons sont cependant rendues difficiles par les changements intervenus (libellé et ordre des questions, mode de recueil de l’information, etc.).


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